samedi 5 août 2017

The Psychic, de Lucio Fulci

The Psychic / Sette note in nero est un giallo de 1977 dirigé par Lucio Fulci. Le générique se compose principalement de Jennifer O'Neill, Gianni Garko, Gabriele Ferzetti, Marc Porel, Evelyn Stewart et Jenny Tamburi.

En 1959, à Douvres, une femme se suicide en se jetant d'une falaise. Au même instant, sa fille Virginia, à Florence, fait l'expérience d'une vision de sa mère. Quelque vingt ans plus tard, Virginia (Jennifer O'Neill) habite près de Rome et a épousé Francesco Ducci (Gianni Garko), un riche homme d'affaires. Ducci part en déplacement professionnel et Virginia repart seule de l'aéroport. En chemin, elle a à nouveau des visions: une femme d'un certain âge assassinée, un mur en train d'être abattu et une lettre dissimulée sous une statue.

Virginia souhaite faire rénover une demeure à l'abandon que son époux a acheté mais remarque que la bâtisse ressemble à une propriété qu'elle a vu au cours d'une transe. Elle démolit un mur dans une pièce et trouve un squelette derrière le plâtre. Croyant que le squelette est celui de la femme de sa vision, Virginia appelle la police. Les enquêteurs ne croient pas à son histoire et accusent Ducci du meurtre.

L'examen du corps révèle qu'il ne s'agit pas d'une femme âgée mais d'une jeune femme dans la vingtaine, Agneta Bignardi, tuée à peu près cinq ans plus tôt. Le squelette finit par être identifié: c'est l'ex-petite amie de Ducci, disparue il y a plusieurs années. Virginia est bien décidée à innocenter son époux. Pour ce faire, elle contacte son ami Luca Fattori (Marc Porel). Fattori est chercheur en parapsychologie. Sa propre enquête finit par le diriger vers Emilio Rospini (Gabriele Ferzetti), qui est peut-être le vrai coupable.

Francesco revient de son voyage d'affaires et Virginia le met au courant de tout ce qui vient de se passer. Il la supplie de chasser tout cela de son esprit mais elle, au contraire, devient de plus en plus obsédée par ce mystère. Elle discute de l'affaire avec Gloria (Evelyn Stewart), la sœur de Francesco, et Melli (Riccardo Parisio Perrotti), un avocat ami de Gloria. Gloria déclare que son frère est parti en voyage d'affaires aux Etats-Unis en avril 1972 et que la personne qui a changé le mobilier de la pièce, c'est elle. La pièce au cadavre emmuré avait été la chambre de Francesco. Les meubles aperçus par Virginia pendant sa vision sont ceux achetés par Gloria après le départ de Francesco.

Quelques jours plus tard, Virginia achète un magazine sur la couverture duquel se trouve une photographie de la jeune femme assassinée. Il s'agit du même magazine vu pendant la transe de Virginia. Quand Luca se rend compte que le magazine en question n'existe que depuis une année, il comprend que ce dont Virginia a fait l'expérience, c'est une prémonition et non une vision de crimes passés. Virginia et Luca découvrent d'autres éléments semblant innocenter Francesco, ce qui permet à celui-ci d'être libéré sous caution. Gloria, pendant ce temps, offre en cadeau à Virginia une montre. La montre, à chaque nouvelle heure, émet une petite musique lancinante.

En proie à des visions de plus en pus fréquentes, Virginia monte dans un taxi de couleur jaune. À l'intérieur se trouve une CB dont le voyant rouge clignote. Elle part du bureau de Luca pour se rendre chez elle, exactement comme dans sa vision. La mystérieuse femme âgée téléphone à Virginia et laisse un message sur son répondeur: elle lui propose des informations concernant l'affaire. Lorsque Virginia arrive au domicile de cette dernière, elle la trouve morte (dans la même position qu'au cours de sa vision). Rospini surgit et Virginia s'enfuit épouvantée. Après s'être emparée d'une lettre (au contenu vital) vue aussi en transe, Virginia gagne la route et pénètre dans une église en cours de travaux, non loin de là. Elle s'y cache mais Rospini la retrouve car sa montre se met à sonner l'heure. Celui-ci tente de l'atteindre sur un échafaudage de bois mais glisse et va s'écraser sur le sol de marbre, plusieurs mètres plus bas.

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Virginia court jusqu'à la vieille demeure (rachetée par Francesco) qui se situe à proximité. Elle lui téléphone pour lui dire de venir tout de suite. Une fois arrivé, elle s'alarme intérieurement de le voir boiter (dans sa vision, un inconnu boite). Il lui explique s'être foulé la cheville quelques heures plus tôt. Les deux se rendent dans la pièce fatale. Francesco pose sur une table un exemplaire du magazine avec Agneta en couverture. De plus en plus nerveuse, Virginia commence à fumer une des Gitanes maïs de Gloria (un autre cadeau) et place celle-ci sur un cendrier aperçu aussi en transe.

À l'hôpital, la police s'entretient avec Rospini, gravement blessé. Rospini relate avec peine certains événements. En 1972, la femme d'un certain âge, signora Casati, reçut un acquéreur illicite pour une toile de grande valeur exposée dans une proche galerie. Francesco Ducci, Rospini et Agneta Bignardi avaient été impliqués dans le vol. Rospini tua un gardien, fait mentionné dans une lettre à Casati et écrite par Agneta. Rospini, en fait, ne cherchait pas à tuer Virginia mais seulement à récupérer la lettre. Casani était déjà morte à son arrivée, tuée par Francesco qui se foula la cheville en sautant d'une fenêtre. Francesco tua aussi Agneta cinq ans auparavant: elle voulait s'enfuir avec le tableau.

Seule avec son mari, Virginia s'effraie de plus en plus de la convergence graduelle des éléments de ses visions. Un lien crucial, dans cette chaîne, est le moment où Francesco aperçoit sur un buffet la lettre incriminante. Virginia affirme qu'elle ne l'a pas lue mais Francesco ne la croit pas. Il l'attaque soudain avec un tisonnier. Elle esquive son premier coup et le tisonnier va fracasser un miroir (également vu en transe). Le second coup l'atteint à la tête. Virginia s'effondre et saigne abondamment. Francesco se prépare à emmurer son épouse dans le trou dégagé. En définitive, tous les détails de la pièce concordent: la vision qu'a eue Virginia est celle de son propre assassinat.

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Un peu plus tard, Luca détermine (grâce à la couverture du magazine) les lieu et moment véritables où Francesco aurait pu tuer Agneta Bignardi. Il fonce alors à la villa Ducci et se fait prendre en chasse par deux motards carabinieri (pour excès de vitesse). Il parvient à leur échapper pendant assez longtemps pour mûrir ses soupçons. Une fois tout le monde arrivé à la villa, Francesco leur ouvre la porte et les fait entrer dans la fameuse pièce. Il leur fait part de ses inquiétudes au sujet de la disparition de son épouse. Malgré les questions des policiers et les remarques de Luca, Francesco garde le contrôle de lui-même. Alors que Luca est sur le point de repartir, escorté par les motards, tout le monde entend les sept notes de la montre, venues du mur derrière lequel se trouve le corps de Virginia...

Le paranormal, dans ce film, est évidemment un élément central de l'intrigue, il n'est pas cautionné par certains personnages de l'intrigue (comme on peut s'y attendre) mais il n'est pas non plus objet de stupéfaction. C'est presque un phénomène normal et, en réalité, la seule attitude non éclairée vis-à-vis de l'acception du paranormal (qui n'est peut-être qu'un normal actuellement rejeté par la science officielle) est celle du couple de paysans rapidement aperçus dans la villa pas encore retapée, au début du film. Demeure néanmoins le problème de l'interprétation des visions. Il se divise en deux courants confluents: le premier est en rapport avec la flèche du temps ou disons l'expérience du temps. Pour Virginia, le temps linéaire va en réalité se boucler sur lui-même puisque ce qu'elle aperçoit n'est pas le passé mais l'avenir (premier courant) et que cet avenir est le sien (second courant). Dans la pensée traditionnelle, le temps est cyclique mais cela ne signifie pas que l'individu revit sans cesse la même chose, comme sur un disque rayé. Au moment où un cycle d'existence se conclut, le cercle se poursuit mais avec un hiatus ontologique, un décrochage permettant l'accès à un niveau immédiatement supérieur. La doctrine cyclique du temps est plus exactement l'ascension d'une spirale. Le hiatus en question, c'est ce que nous appelons la mort (qui est effectivement mort à un état antérieur et simultanément naissance à un état supérieur).

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La question que je me pose, c'est: Virginia est-elle vraiment morte emmurée? Ses fonctions vitales se trouvent peut-être au plus bas, avec le manque d'air et sa blessure crânienne mais bon... La fin du film ne me semble pas si évidente que ça... Mais il se peut tout bêtement que je n'aie pas envie de voir mourir ce personnage. Ce que je trouve en revanche un peu plus clair, c'est sa pulsion de mort. Réprimée, je veux bien l'admettre. Regardons bien: au début de l'histoire, la mère de Virginia se suicide (on ne dit d'ailleurs pas pour quelle raison). Une fois adulte, Virginia est identifiée à cette dernière: ressemblance physique, habillement, ressemblance des véhicules qu'elles conduisent. Notez, je vous prie, l'usage que je fais de la tournure passive: elle ne s'identifie pas à sa mère parce qu'elle n'en est pas consciente mais elle lui est identifiée (par le spectateur). L'élément qui me fait pencher pour la thèse de la pulsion de mort inconsciente, c'est ce qu'on pourrait appeler le dernier maillon de la chaîne visionnaire: le fameux tableau dérobé. Sa nature me semble importante. Il s'agit d'une icône représentant la Vierge à l'enfant Jésus. C'est le retour désiré de la mère morte, le désir de reprendre l'enfance, autrement dit le désir d'une circularité ou d'une rotondité ventrale qui ne trouvera son accomplissement que dans le "ventre" d'un mur, à l'état (peut-être) de cadavre. Très intéressante aussi est la scène où Virginia et Francesco quittent l'hôtel de police: vue en plongée, chemin en spirale mais spirale descendante. Régressive? Le guide, dans ce cas, serait le bellâtre et meurtrier époux et non un avatar de Virgile. Dans La divine comédie, la remontée ne peut se faire qu'après une descente jusqu'au point le plus bas de l'Enfer, là où s'opère le retournement, au point de jonction du ∞. Ici, donc, j'ai un doute. Par ailleurs, la blessure de Virginia rappelle les blessures reçues par sa mère au cours de sa chute mortelle. Non, finalement, je pense que la fille y passe aussi.
C'est un giallo assez soft mais un giallo quand même, hein...

Au final, je trouve que Fulci a réalisé là un solide film à suspense, sans avoir recours à des effets (trop) grandiloquents. La grandiloquence "bien mal faite", cela dit, j'apprécie beaucoup et ce cinéaste nous en a également offert, au point de figurer sur une liste de films censurés, voire interdits, établie au début des années quatre-vingt par une commission de censure britannique. Evidemment, ça me donne encore plus envie de regarder les œuvres en question...

Il est possible d'enculer le système en regardant gratuitement ce film ici.


Steuplaît, t'aurais pas des Kleenex?

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